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Plus particulièrement, à la suite d’un dégât des eaux, un occupant précaire a assigné le propriétaire du local mis à sa disposition, ainsi que son assureur, en indemnisation de son préjudice. La cour d’appel a fait droit à sa demande, en condamnant les défendeurs au paiement de dommages et intérêts au visa de l’article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-1331 du 10 février 2016.
Pour la Cour d’appel en effet, l’existence d’infiltrations dans le local caractérisait un manquement du propriétaire à son obligation de délivrance, prévue par l’article 1719 du Code civil. Or, et en vertu de l’article 1147 du Code civil, dans sa version applicable à la cause, le débiteur d’une obligation doit être condamné au paiement de dommages et intérêts en cas d’inexécution ou de retard dans l’exécution, sauf cause étrangère.
Ce raisonnement est censuré par la Haute juridiction qui, reprenant une décision antérieure (Cass. 3ème civ., 19 nov. 2014, n°13-20.089), rappelle que la convention d’occupation précaire n’est pas un bail. Partant, les dispositions légales relatives aux baux ne lui sont pas applicables ; il revenait alors à l’occupant qui souhaitait obtenir réparation d’établir un manquement contractuel de son cocontractant, la convention d’occupation précaire n’étant régie que par les prévisions contractuelles des parties.
Pour mémoire, d’origine prétorienne, la convention d’occupation précaire est définie, depuis la loi n°2014-626 du 18 juin 2014 (dite « loi Pinel »), par l’article L. 145-5-1 du Code de commerce comme une convention aux termes de laquelle un occupant est autorisé à occuper les lieux jusqu’à ce qu’un évènement, indépendant de la seule volonté des parties, se réalise, reprenant ainsi sensiblement celle précédemment retenue par la Cour de cassation (Cass. 3ème civ., 19 nov. 2003, n°02-15.887).
Il s’agit ainsi souvent pour les parties de ne pas se lier par un bail dans l’hypothèse où l’occupation, motivée par des circonstances exceptionnelles, est susceptible de prendre fin à tout moment, à l’initiative du propriétaire. Ces conventions sont exclues du champ d’application du statut des baux commerciaux en raison de leur durée.
Sachant que la Cour de cassation veille particulièrement au contrôle par les juges du fond de l’existence d’une cause légitime et réelle de précarité au jour de la conclusion de la convention (Cass. 3ème civ., 14 avr. 2015, n°14-10.128).
S’il était ainsi admis que la convention d’occupation précaire ne relevait pas du statut des baux commerciaux, la Haute juridiction a poussé le raisonnement plus loin, en excluant plus radicalement la qualification de bail.
Cette solution peut s’expliquer par l’absence de stabilité dans le temps de l’occupation conférée par la convention, contrairement au bail, dont l’inscription de la jouissance dans le temps constituerait l’un des éléments constitutifs.
Par suite, un occupant à titre précaire ne peut se prévaloir du droit commun du louage, qui ne trouve pas à s’appliquer à la convention, même à titre supplétif des volontés.
Or, l’article 1719 du Code civil figure au sein du Chapitre II du Titre VIII du Code civil, relatif au louage des choses, et impose au bailleur de respecter diverses obligations, parmi lesquelles celle de délivrer au preneur la chose louée et de l’entretenir en cours d’exécution du bail. La convention d’occupation précaire n’étant pas un bail, ces obligations de délivrance et d’entretien ne doit nullement être respectée par le propriétaire, à défaut de stipulation contraire.
En effet, dès lors que le droit commun du louage est exclu, la convention d’occupation précaire est uniquement régie par ses clauses et conditions. Il revient ainsi aux parties de prévoir expressément les obligations incombant à chacune d’entre elles, voire de se référer explicitement au droit commun du louage pour en garantir l’application.
Cette solution a pu être critiquée, dans la mesure où toute location suppose une jouissance de la chose louée, qui se traduit par une obligation de délivrance et une obligation d’entretien de cette chose (« Nature sui generis de la convention d’occupation précaire », L. Molina, L’Essentiel Droit des contrats n°2, p. 6, 7 févr. 2024).
Certains auteurs se sont interrogés sur le recours, pour l’occupant à titre précaire, au droit commun des obligations, et notamment aux articles 1106, 1163 et 1166 du Code civil, définissant le contrat synallagmatique, et se rapportant à la notion de prestation en tant qu’objet de l’obligation.
S’il eut pu être envisageable de se fonder sur ces dispositions pour sanctionner un propriétaire qui n’aurait pas fourni, dès l’origine, le local objet de la convention, il semble toutefois plus délicat de les invoquer pour justifier une obligation d’entretien du local pendant toute la durée de l’occupation, compte tenu de la précarité de celle-ci (« Régime de la convention d’occupation précaire », J.-D. Barbier et S. Valade, D. actualité, 26 janv. 2024).
Pour d’autres d’auteurs, l’article 1188 du Code civil, alinéa 2, permettrait d’interpréter la convention d’occupation précaire dans le sens qu’une personne raisonnable lui donnerait, afin d’y inclure une obligation de délivrance (L. Molina, infra).
En l’état, et afin de prémunir les parties de toute éventuelle difficulté, il leur est vivement conseillé, au stade de la conclusion de la convention, de prendre soin à la rédaction de leurs obligations respectives.